106 liDOUA.RD ,tlANET éclate dans sa correspondance : " Manet, écrivait-elle avant que s'ouvrit le Salon de 70, me fait de la morale et m'offre cette éternelle M11 ' Gonzalès comme modèle ... En attendz.nt, il recommence son portrait pour la vingtième fois; elle pose tous les jours et, le soir, la tête est passée au savon noir. Voilà qui est encourageant!. .. " Bientôt \'Allemagne envahit la France, et c'est la grande dispersion. Eva reçoit par ballon des nouvelles de Manet:" Degas et moi sommes dans l'artillerie, canonniers volontaires. Je compte qu'à votre retour vous ferez un portrait de moi avec ma grande capote. " Après l'armistice, il reprend des relations régulières aussi bien avec Berthe qu'avec Gonzalès. Rien ne le soutient mieux, dans le combat qu'il mène contre une opinion déchaînée, que la fidèlité de leur admiration. Eva ne prend aucun ombrage des nombreux portraits que Berthe lui inspire entre 1872 et 1874. Quand clic se voit refuser, en 74, La Loge aux ltalie1u, elle sait que c'est Manet qu'on frappe à travers elle; clic est fière de partager sa disgrâce. Sans cesse on lui répète qu'il faut choisir entre le vice et la vertu, la vertu étant paradoxalement représentée par son premier maître, Chaplin, élégant héritier des grâces du XVIII' siècle. Mais l'éclatante précocité de la jeune fille, l'envoi au Salon de pastels et de toiles où se révèle un sens exquis de "l'intérieur" et des petits bonheurs quotidiens, une personnalité qui s'affirme de jour en jour, valent à cette artiste intrépide des succès parallèles à ceux de sa grande rivale. Toute irritation dans leur esprit ou dans leur cœur semble, d'ailleurs, apaisée. Désireux d'assurer leur bonheur et de les conserver l'une et l'autre à portée de son regard, Ce blond, ce 1"ia11t Manet De qui la t,1"âce émanait se réjouira de voir son frère Eugène épouser Berthe Morisot en 187+ Eva unira sa vie, en 1879, au graveur Henri Guérard, charmant bohêmc, un des plus fidèles amis de Manet et son interprète préféré. * La qualité des pastels d'Eva (La Nichée, La Mariée, La Demoiselle d'honneur, Le Bouquet de violettes, Le Panier à ouvrage, La Modiste), de ses intimités ( A Ho11jleur, La Femme à l'éventail), fait maintenant d'elle, si pudique, l'une des vedettes les plus aimées du Salon. Le 19 avril 1883, trente-quatrième anniversaire de sa naissance, elle met au monde un fils. A peine relevée de couches, elle apprend l'amputation de Manet, puis sa brusque mort. Le j mai, on la trouve assise sur son lit, expirant auprès d'un berceau, des fleurs à la main. Une embolie (Suite page 158.J FEMME A L'EVENTAI Ce des,;in et le pustd ill Bouquet ,le viole/Ill font parlie des œu•ft" d'Eva Gomrnlè~ qu'uJI belle exposition vienl ji réunir à la Galerie Dabfi'
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