Album du Figaro, N° 23, avril-mai 1950

!10 ,, llllUIRll P\ll rnrn t) liHII OI S de 1'1\ cade111 i e ~'ra11 çai se t:N CIKQUAKTE m Ll)S I' El! li ES OH BIEN sourm CIIHGÉ D'IDOLI) PIIOTOS HENRI MAt,,:UEI~ NADAR, KEYSTONE F.T ASSOCIATED PRESS. COLLECTIONS COSSIRA ET ROM!. Le mot séduire a deux sens. Séduire, c'est plaire, toucher, persuader; c'est aussi conquérir un être sans défense. Au dix-huitième siècle, un séducteur était Casanova ou Valmont, le dangereux et volage amant qui corrompt les filles innocentes. Au vingtième siècle, les femmes sont mieux averties ; la séduction criminelle devient plus rare. Nous parlons d'un séducteur ou d'une séductrice avec une secrète admiration. Le séducteur est l'homme qui sait plaire et va de victoire en victoire; la séductrice est la femme irrésistible. Il est intéressant d'étudier les traits qui les font, l'un et l'autre, séduisants. - * Les femmes, pour la plupart, sont séduites par la force. Depuis les siècles des siècles, elles cherchent en l'homme un appui. Mais la force peut prendre des formes très différentes. Le grand joueur de football triomphe auprès des sportives, le grand virtuose parmi les musiciennes. Tout homme qui excelle en son métier a sa chance. L'homme politique, le banquier, le chirurgien, l'orateur, le roman• cier, le journaliste, l'acteur, le champion de tennis sont des séducteurs en puissance. Qgi d'entre eux l'emportera? Cela dépend des femmes et des époques. En temps de guerre, le général vainqueur, le chef de commando, l'aviateur aux trente palmes sont au sommet de la hiérarchie. En temps de révolution, le partisan, le commissaire du peuple, le dictateur deviennent des amants souhaita'!::iles. En temps de stabilité sociale, la naissance et l'argent ont leur prestige." Jamais surintendant ne trouva de cruelles." Dans une société cultivée, le poète, le peintre, k compositeur, voient les femmes à leurs pieds. Byron, Chaceaubriand,Musset, Liszt, Wagner ont été toute leur vie des séducteurs. Anatole France avait soixantehuit ans quand une jeune femme, pour lui, se suicida. Gabriele d'Annunz.io, dont le visage était sans beauté, mais le 1yrisme éloquent, fit des conquêtes jusqu'à sa mort. Le type physique du séducteur doit, lui aussi, être adapté aux femmes qu'il s'agit de séduire. La femme virile et maternelle ne cherche pas la force ; elle est touchée par la faiblesse. George Sand n'aimait vraiment que des hommes plus jeunes qu'elle, presque toujours malades, et qui avaient besoin de sa protection. Les femmes de notre temps, mieux armées pour la vie que leurs grand-mères, parce qu'elles ont conquis leur indépendance économique et parce que la pratique des sports les a rendues plus vigoureuses, attachent moins d'importance, dans le choix d'un homme, à la force brute. Le séducteur, au cinéma, n'est plus que rarement un Tarz.an à la formidable musculature. Un Gérard Philipe, mince, frêle, à la fois novice et cynique, plaît aux femmes de 1950. En Amérique, le bohème débraillé, divertissant, a plus de succès féminins à l'écran que l'industriel ou le banquier. C'est que l'AméA cha11ue époque -'"e-'" séduct e urs.. En a11101u•, le pre...ttge La beauté ne fait f.U.'li toute la !lôéductlon. ricaine moderne, qui s'ennuie, a besoin d'être amusée plus que protégée. Qgellc que soit la femme ou l'époque, la qualité la prns nécessaire au séducteur, c'est l'audace. Les femmes appartiennent à ceux qui s'occupent d'elles avec passion, et les poursuivent avec ténacité. Peu d'hommes font de la conquête des femmes l'objet principal de leur vie. Or, beaucoup de femmes ont besoin d'hommages pour se rassurer sur elles• mêmes ; beaucoup ne peuvent se passer d'émotions romanesques. Le séducteur professionnel sait remplir ces vies trop vides. Tl acquiert une technique amoureuse qui le rend à peu près invincible. Voyez Lovelace, Valmont, Bel-Ami, Costals. En amour, plus qu'en tout autre jeu, le prestige assure la victoire. Il n'y a que la première conquête qui coûte. La réputation de Don Juan une fois faite, beaucoup de femmes tombent avant même que d'être attaquées. " Pourquoi pas moi ", pensent-clics, " alors que toutes les autres?... "Don Juan choisit ses premières maîtresses; ensuite il est choisi. Byron, dont la réputation de séducteur était solidement établie, voulut un jour respecter la femme d'un ami ; clic ne le lui pardonna jamais. * A la femme qui veut séduire, la beauté est plus nécessaire qu'à l'homme. Toutefois, des femmes dont la beauté était fort ordinaire, ont été de grandes séductrices. Elles avaient GARRIEl,E D'A,'"~"UNZIO galopait sur les routes, tout lut sur un cheval blanc. Les femmes de 1.900 ne Jo11geaient pas à se plaindre de ce qu'o11 n'ait paJ wcore inventé l'automobile. BO~U-'AC•; DE (;,U,i,TELLA:\°E, 1.1.l~II,~ GUITllv. 011 l'appelait ({ le pl!.Jôt &ni, le der11ier de 110J" da ,- 1/IR~t re •, 111aiJ il e11t tout de mé111e des U11e femme laide et légitime lui r' ;::;use;: Il était i11Ji11immt intelun pala!J" rose. Buwcoupd'a11traf •. Stl w fit pleurer quelquesbefie.s lui do1111èrent une vie lllts, il sut toujours /eJ faire Jourire. Toute- Puùsa11ce ", (û 11101 ét'oqu, lgtûement les pièces J011ores, vides et pompeu.res qu'il jouait au Fra11çais). A,'"DRt BllULt, t1l 1.91:>.cbe-zKl;a11e, Je faisait applaudir daru" Raffle.s ". Il fut le premier gentilhomme cambrioleur. 1Hi11ce, ÛéJ,aut,il J"Ut J'i11troduire par effraction dans lu cœurJ. G•;ORGES C ARP ..;1':TIEll, trop Jpôrtifpour être hom"11Je à fmwres,faiJ"ait battre touJ lu cœurJ fé111i11i11s. Le jour de JQ11 grand m(ltCb, des avions volèrwt J"Ur Paris pour en donner le résultat. Ill

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